Grands-parents musulmans : comment sont-ils appelés dans la tradition ?

Dire que toutes les familles musulmanes appellent leurs grands-parents de la même façon serait aussi absurde qu’imaginer une seule recette de couscous. Dans le vaste monde musulman, les mots pour désigner les aïeux se déclinent, s’adaptent, se transmettent,parfois de génération en génération, parfois d’une langue à l’autre. Et derrière ces appellations, c’est tout un rapport au passé, à la transmission et à la mémoire qui s’exprime.

Les règles de succession en islam dessinent une cartographie familiale singulière. Les droits des grands-parents, loin d’être anecdotiques, diffèrent sensiblement de ceux auxquels on pourrait s’attendre dans d’autres systèmes juridiques. Cette particularité du droit musulman façonne la manière dont la mémoire se transmet, dont l’héritage circule, et colore les rituels funéraires d’une teinte où la relation intergénérationnelle occupe le devant de la scène.

Qui sont les grands-parents dans la tradition musulmane ?

Dans l’univers musulman, les grands-parents ne se contentent pas d’être les figures discrètes en bout de table. Leur rôle dépasse la simple transmission de souvenirs : ils incarnent le socle, la sagesse, le lien entre passé et avenir. Le terme arabe « jadd » pour le grand-père et « jadda » pour la grand-mère s’impose dans de nombreux pays, mais chaque région, chaque famille parfois, ajoute sa propre couleur. En Turquie, on parle de « dede », tandis que dans certains pays d’Afrique subsaharienne, il n’est pas rare d’entendre « baba » ou « mama » pour désigner respectueusement les aînés.

La famille musulmane, souvent étendue, laisse une grande place aux aînés. Leur voix compte, leurs conseils pèsent. Ce respect, ancré dans la religion et rappelé par les enseignements du prophète Muhammad (paix sur lui), s’exprime au quotidien : on sollicite l’avis du grand-père, on écoute les histoires de la grand-mère, on suit leurs recommandations lors des fêtes ou des passages de vie.

  • Voici quelques appellations et statuts fréquemment rencontrés dans le monde musulman :
  • « Jadd » et « jadda » sont les mots arabes classiques pour nommer grand-père et grand-mère.
  • Dans plusieurs pays, d’autres termes s’imposent : « dede » en Turquie, ou encore « baba » et « mama » dans certains foyers africains.
  • Au-delà du vocabulaire, les grands-parents occupent souvent une position honorifique, associée à l’autorité morale et à la sagesse.

Le lien entre générations, dans l’islam, ne se limite pas à la biologie. La notion de « rahma »,la miséricorde,teinte les relations familiales d’une tendresse particulière. Les aînés transmettent la foi, les valeurs, les usages, mais surtout une manière d’habiter la famille et le monde. Dans le Coran comme dans les hadiths, ce rôle de passeur est mis en avant, donnant aux grands-parents une place centrale dans la construction de l’identité familiale, toujours à la croisée de la tradition et de la diversité culturelle.

Rites funéraires musulmans : étapes clés et sens profond

Les rites funéraires musulmans ne laissent rien au hasard. Dès qu’un décès survient, la communauté s’organise : chaque geste, chaque parole compte, dans le respect de la dignité du défunt. La toilette mortuaire, ou ghusl, ouvre la séquence des adieux. Cette purification, réalisée par des proches du même sexe, se fait dans le silence, la pudeur et le respect. Il ne s’agit pas d’un simple lavage, mais d’un acte spirituel, porteur de sens, qui s’inscrit dans la continuité de la tradition prophétique.

Une fois la toilette accomplie, la suite se déroule souvent à la mosquée ou dans un espace adapté. La prière funèbre (salat al-janaza), récitée debout, sans prosternation, réunit famille, amis, voisins. L’émotion est là, contenue, partagée. Cette prière, destinée à implorer la miséricorde divine pour le défunt, rappelle à tous la fraternité et l’humilité qui sous-tendent l’islam.

Vient ensuite l’inhumation, rapide, généralement dans les vingt-quatre heures. Contrairement à d’autres cultures, la crémation est écartée. Le défunt repose en pleine terre, tourné vers La Mecque, enveloppé d’un simple linceul ou, selon les cas, déposé sans cercueil. Les proches, parfois démunis de mots, accompagnent le geste ultime d’une prière, d’un silence, d’une présence.

Le deuil, dans la culture musulmane, se vit dans la discrétion. Trois jours de visites et de prières permettent à la famille de recevoir le soutien de la communauté. La mémoire du défunt se prolonge ensuite à travers la récitation du Coran, les invocations, les gestes de solidarité. À Paris, en France, ou partout ailleurs, ces rites maintiennent un fil entre les disparus et les vivants, entre hier et aujourd’hui.

Ce que dit l’islam sur la succession et l’héritage familial

La succession, en islam, relève d’une organisation minutieuse. Le Coran ne laisse pas de place à l’arbitraire : chaque héritier, selon son lien avec le défunt, reçoit une part bien déterminée. Ce système vise à préserver la paix des familles et à assurer une forme d’équité entre les membres, évitant au maximum les querelles qui pourraient surgir à la disparition d’un proche.

Le rôle des grands-parents dépend de leur situation vis-à-vis du défunt. Si les parents directs ne sont plus là, le grand-père et la grand-mère accèdent parfois à une part de l’héritage, selon les prescriptions du droit musulman. Le calcul,fruit d’une science précise appelée ilm al-fara’id,varie selon la présence d’enfants ou d’autres membres de la famille. Par exemple, si le défunt a laissé des enfants, la part des ascendants diminue, mais une reconnaissance, même minime, subsiste toujours.

Ce cadre, appliqué dans de nombreux pays musulmans, introduit la notion de parts réservées tout en autorisant certains dons ou legs dans la limite du tiers du patrimoine. Les héritiers collatéraux (frères, sœurs, oncles) voient leur statut évoluer selon les circonstances familiales. En France, la cohabitation du droit civil et des règles musulmanes amène parfois des ajustements, sources de discussions dans les familles issues de l’immigration.

Femme musulmane et sa mère marchant dans le parc

Transmettre valeurs et mémoire : le rôle des aînés dans la culture musulmane

Au cœur de la famille musulmane, l’idée de transmission occupe une place de choix. Les grands-parents, appelés jid et jadda dans de nombreuses cultures, incarnent la mémoire vivante des foyers. Leur présence tisse un lien entre les générations, nourrit le sentiment d’appartenance et perpétue un patrimoine à la fois spirituel et social.

Leur influence se manifeste au quotidien : une parole glissée lors d’un repas, un conseil prodigué avec bienveillance, la répétition d’un geste ou d’une prière. Dans bon nombre de familles, la grand-mère initie les petits-enfants aux premiers versets du Coran, partage les souvenirs du pays d’origine, tandis que le grand-père transmet les règles de bienséance ou des récits sur la vie du prophète Muhammad (paix sur lui). Cette transmission informelle structure l’éducation, façonne les repères, et ancre chaque membre dans une histoire collective.

Parmi les aspects concrets de cette transmission, on retrouve :

  • L’apprentissage de la langue maternelle, souvent entretenu par les aînés.
  • Le récit des migrations, des départs, des arrivées, qui donne du sens à l’histoire familiale.
  • L’enseignement des valeurs morales puisées dans l’islam, telles que la générosité, la patience ou l’honnêteté.
  • La préservation des coutumes, notamment lors des grandes fêtes religieuses.

Ce passage de témoin, génération après génération, assure la continuité d’une mémoire familiale. En France, en Europe ou ailleurs, même lorsque la réalité du quotidien se transforme, les aînés demeurent ce point d’ancrage. Ils gardent vivante la flamme d’un héritage, discret mais puissant, qui éclaire le chemin de ceux qui viennent après eux.